Même en plein après-midi, certaines salles sentent toujours le renfermé. La poussière centenaire et les sièges déglingués. Et c'est souvent sans savoir où caler ses jambes et en guettant la crampe qu'on peut assister à des films comme "Violent Days". Et apprécier une salle quasi vide, enfin débarassée des poufiasses qui gloussent derrière en tapant dans mon siège.
Pour voir un film rock'n'roll, donc, puisque nous présentant des fans de rockabilly dont les prouesses capillaires rendraient jaloux Brian Setzer. Oscillant entre documentaire et fiction, entre Jarmusch et "Strip-Tease", "Violent Days" montre des gueules abîmées que le rock'n'roll a détourné des chemins de la dépression. Car c'est bien de misère affective dont il est question, de rêves éconduits et de perspectives décharnées, d'hommes perdus entre silence léthargique et pertes de contrôle vaguement suicidaires. Un dénuement social dans lequel les personnages se raccrochent à la musique, à leur coiffure et à leur blouson. Et tout au long du film, le rock'n'roll est bel et bien omniprésent, mais constamment étouffé, à l'arrière plan d'un sentiment de malaise permanent.
Au centre de la partie fiction, il y a une blonde qui n'a rien à foutre là. Elle est magnifique, et elle chante des ballades jazz. Elle cherche sa place, elle cherche l'attention de son homme et dégage une pureté invariablement touchante mais incapable de s'épanouir dans un monde tout de virilité machiste.
Et malgré quelques longueurs inévitables pour un cinéma d'auteur novice, "Violent Days" vient nous rappeler que certains ont littéralement besoin du rock'n'roll, que ce n'est plus de la musique, ou de l'art, ou de la culture ou tout ce que Télérama pourra en dire. Le rock'n'roll, c'est un anxiolytique sans ordonnance.